Le sommet du 18 août 2021 restera tout particulier dans les annales de l’histoire de la Communauté économique et monétaire de l’Afrique centrale (Cemac). Il est plus perçu comme une occasion de répondre aux exigences des responsables du Fonds monétaire international (FMI) et de ceux de la Banque mondiale (BM) : recommander le vaccin à la population et accéder aux droits de tirage spéciaux (DTS).
Ainsi, les hauts responsables de la sous-région ont « décidé d’impulser une nouvelle et forte dynamique à la stratégie régionale de redressement économique et financier, à travers les programmes économiques et financiers de deuxième génération à conclure avec le FMI, appuyés entre autres par la Banque Mondiale, la Banque Africaine de Développement, la France. A cet égard, la coordination accrue des interventions des partenaires multilatéraux et régionaux sera de nature à assurer une plus grande mobilisation des financements et un meilleur impact économique, financier et social. »
Les institutions du Bretton woods sont carrément à la rescousse de la Cemac car ses Etats membres sont exhortés à « finaliser et à conclure des programmes avec le FMI, en vue de conférer à la stratégie régionale de relance son caractère communautaire et solidaire, lui garantir le plus grand succès avec le soutien du FMI, de la BM, de la BAD, de la France et des autres Partenaires Techniques et Financiers. »
Farouchement opposé au FMI à l’aube des années 90 avant de recevoir la douche froide de la dévaluation du FCFA en 94 et d’autres chocs économiques comme la dépréciation du pétrole en 2016, Paul Biya n’a plus d’autre choix que de tenir un discours qui n’écorche pas la Banque de France, la BM, et le FMI. « Pour notre relance économique, nous allons miser sur une croissance forte, durable et inclusive, en mettant au centre de nos préoccupations le bien-être de nos concitoyens. Ce qui passe par leur meilleur accès aux services sociaux de base, notamment à ceux de santé, d’éducation, de protection sociale des plus vulnérables, etc. C’est dans ce sens que nous avons salué les initiatives de nos partenaires au développement. En l’occurrence la récente décision du FMI au sujet des droits de Tirage Spéciaux dont j’ai parlée dans mon propos d’ouverture », indique Paul Biya.
En marge de tout ceci, le FMI et la BM quant à eux ont leur contribution. Ils agiront là où les Etats de la Cemac peinent le plus. L’accès aux financements, et la courbe vertigineuse de leurs dettes. Et donc, indique le communiqué final aux travaux de Yaoundé tenus en visioconférence, les chefs d’Etat de la sous-région ont accueilli favorablement toutes les initiatives internationales de soutien, notamment les financements d’urgence, l’Initiative de Suspension du Service de la dette, la restructuration et l’allègement de la dette, la mise en place du cadre commun du G20, dans le but d’assurer de manière durable la viabilité des finances publiques et la soutenabilité de la dette.
Ils ont en outre salué la nouvelle allocation générale des Droits de Tirage Spéciaux décidée par le FMI à concurrence de 650 milliards de dollars américains et plaidé en faveur d’une réallocation des DTS des pays développés vers les pays en développement ainsi que pour une reconstitution ambitieuse des ressources de l’IDA 20 d’au moins 100 milliards de dollars américains.
Des engagements qui emmènent la Cemac à ouvrir encore plus ses bras au vaccin. Les six Etats, apprend-on, ont « affirmé leur détermination à accélérer les campagnes de vaccination pour protéger les populations, sauver des vies et favoriser une réouverture maîtrisée des économies de la sous-région, en tirant profit des initiatives bilatérales et multilatérales, et sollicité le soutien et la solidarité de la communauté internationale en faveur d’un accès large et équitable au vaccin et à la promotion d’une véritable industrie pharmaceutique dans la sous-région. » Pour Paul Biya, président en exercice de la Cemac, il s’agit là de la mesure salvatrice, qui pourrait conduire à l’immunité collective dans un bloc économique où moins de 5 % des concitoyens est actuellement vaccinées.
Couper ce cordon ombilical avec le FMI n’aura pas lieu demain. Des raisons abondent. « Le monde dans lequel nous vivons devient de plus en plus incertain. De nouvelles sources de vulnérabilité ou de fragilité apparaissent à un rythme élevé. En témoignent : les perturbations liées aux changements climatiques, l’apparition de formes diverses de conflictualités, et la crise sanitaire actuelle », souligne Paul Biya.
Aloys Onana